Non ! non, c’est bien plus beau lorsque c’est inutile ! (Edmond Rostand)

Publié le 10 Mars 2024

 

Je crois qu'elle regarde

 

Qu’elle ose regarder mon nez, cette Camarde !

(Il lève son épée.)

 

Que dites-vous ?… C’est inutile ?… Je le sais !

Mais on ne se bat pas dans l’espoir du succès !

Non ! non, c’est bien plus beau lorsque c’est inutile !

— Qu’est-ce que c’est que tous ceux-là ! — Vous êtes mille ?

Ah ! je vous reconnais, tous mes vieux ennemis !

Le Mensonge ?

 

(Il frappe de son épée le vide.)

 

Tiens, tiens ! — Ha ! ha ! les Compromis,

Les Préjugés, les Lâchetés !…

 

(Il frappe.)

Que je pactise ?

Jamais, jamais ! — Ah ! te voilà, toi, la Sottise !

— Je sais bien qu’à la fin vous me mettrez à bas ;

N’importe : je me bats ! je me bats ! je me bats !

 

(Il fait des moulinets immenses et s’arrête haletant.)

 

Oui, vous m’arrachez tout, le laurier et la rose !

Arrachez ! Il y a malgré vous quelque chose

Que j’emporte, et ce soir, quand j’entrerai chez Dieu,

Mon salut balaiera largement le seuil bleu,

Quelque chose que sans un pli, sans une tache,

J’emporte malgré vous,

 

(Il s’élance l’épée haute.)

 

Et c’est…

 

(L’épée s’échappe de ses mains, il chancelle, tombe dans les bras de Le Bret et de Ragueneau.)

 

 

ROXANE, se penchant sur lui et lui baisant le front

 

C’est ?…

 

CYRANO, rouvre les yeux, la reconnaît et dit en souriant

 

Mon panache.

 

 

Edmond Rostand, extrait de "Cyrano de Bergerac", 1897

 

 

Du même auteur, dans Le Lecturamak : 

Rédigé par jmlire9258

Publié dans #Extraits de livres, #Les Classiques, #Littérature Française

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