avec ce que nous croyons être. (Luigi Pirandello)
Publié le 25 Avril 2025
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" Henri IV : Il faut leur pardonner ! ( Montrant le costume dont il est revêtu). Ce costume, ce costume qui est pour moi la caricature évidente et voulue de cette autre mascarade continuelle, de cette mascarade de tous les instants, dont nous sommes les pantins involontaires, lorsque sans le savoir nous nous masquons avec ce que nous croyons être - ce costume, leur costume, pardonnez-leur, ils ne le voient pas encore comme faisant corps avec leur propre personne... Je me rappelle un prêtre - certainement irlandais - et beau - qui dormait au soleil, un jour de novembre, s'appuyant d'un bras au dossier du banc d'un jardin public : baignant voluptueusement dans cette tiédeur dorée qui pour lui devait être presque estivale. On peut être sûr qu'à ce moment là il ne savait plus ni qu'il était prêtre ni où il était. Il rêvait ! Et Dieu sait ce qu'il pouvait rêver ! Un gamin passa, qui avait arraché une fleur avec toute sa tige. En passant, il le chatouilla, là, dans le cou. Je le vis ouvrir des yeux rieurs, et sa bouche aussi riait tout entière du rire heureux de son rêve ; il riait, oublieux de tout ; mais sur le champ, je peux vous le dire, il reprit la raideur imposée par sa soutane de prêtre et dans ses yeux reparut cette même gravité que vous avez déjà vu dans les miens; car les prêtres irlandais défendent la gravité de leur foi catholique avec le même zèle que moi, quand sont en cause les droits sacro-saints de la monarchie héréditaire. Je suis guéri, mesdames et messieurs : parce que je sais parfaitement qu'ici je joue les fous, et cela, tranquillement ! Le malheur pour vous, c'est que votre folie, vous la vivez dans l'agitation, sans en être conscients et sans en être spectateurs.
Luigi Pirandello : extrait de "Henri IV", 1922. ( lu dans "Mémoires d'Europe, anthologie des littératures européennes.", Gallimard, 1993.
Du même auteur, dans Le Lecturamak :
hirondelles et confessionnal - Le Lecturamak
" Marta était agenouillée sur une de ces pierres, et elle attendait que la vieille pénitente lui cède la place dans le confessionnal. Tant de péchés, pour cette vieille ! Mais était-ce les s...