" Époque 1939/1940.
Boris Vian a intégré l'École centrale. En raison de la guerre l'École est repliée à Angoulème et accueille les étudiants de première année - les plus jeunes, non mobilisés ou réformés. Ces jeunes se sentent libres car ils n'ont pas de parents sur le dos, ils sont indépendants mais la situation extérieure est effrayante...
Si ces lettres évoquent beaucoup une période de pénurie alimentaire..., elles révèlent également le lien fusionnel entre Boris et sa mère ( Pouche ). L'étudiant facétieux, provocateur est aussi sujet à de nombreux tracas de santé qui l'inquiètent et a grande envie d'échapper à tout cela.
Novembre 1939
Lundi 21h15
Ma vieille Pouche*
Tu sais plus bien sur quel pied danser, tu en as un qui s'en va, l'autre qui arrive, et ça se mélange, mais t'en fais pas tout ça se tassera. J'ai reçu deux lettres de toi aujourd'hui, rien de Monette** , hier ni aujourd'hui, je suppose que c'est la poste à moins qu'elle ne soit toujours fâchée. Il n'y avait pas de quoi - alors c'est la poste.
Je te parle pas de mes études parce que je m'en fous, de ma santé parce que je m'en fous, de mes distractions parce qu'elles m'emmerdent, etc.
Il y a qu'une chose de formidable ici, c'est la qualité de l'emmerdement.
C'est record...
Novembre 1939
Jeudi soir...
Est-ce que le patron va vraiment mieux et a-t-il éjecté son rocher ?*** Cet homme est bien ennuyeux avec sa manie de construction. Enfin si le plus mauvais moment est passé, tout va bien...
[...] faut que j'éteigne pour pioncer... te souhaite le bonsoir ainsi qu'aux autres éléments de cette famille éparse. "
Bison.****
Boris Vian, extrait de "Correspondances 1932-1959", Arthème Fayard, 2020.
** Petite amie de BVian.
*** Son père a des calculs rénaux.
**** Surnom de BVian avec lequel il signe beaucoup de ses lettres à sa famille et ses amis.
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