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26 août 2023 6 26 /08 /août /2023 07:46
Portrait par Eugène Dabit (1935)

 

Conduire l'histoire au lieu de la subir.

 

Le débarquement américain, ça paraît très loin. mais ce que je cherche à retrouver , c'est le débarquement vu à l'instant où il se réalisait. Alors, il n'y avait pour ainsi dire plus de passé. l'avenir était ouvert. On  a pu croire, en 1944, que l'avenir était libre, comme on l'a cru en 1918 ; qu'une ouverture allait se faire dans les choses, comme en 1917 pour la révolution bolchevique, qu'une chance était donnée à un bien, sinon au bonheur. Mais, aujourd'hui, les mêmes événements, vous les contemplez et il n'y a pas eu ce bien. Alors, quand on dit que je suis pessimiste, il y a de quoi l'être, non ?...

   Moi, j'ai le malheur de ne pas croire en Dieu. je ne compte donc pas sur l'éternité, je compte sur les hommes. Et, jusqu'à présent, je m'aperçois que c'est partout la même incapacité à dominer les choses, à conduire l'histoire au lieu de la subir. C'est la grande ambition des hommes, de conduire l'histoire ; et bien ! ça ne marche pas, il se peut que ça marche un jour, mais pour l'instant, non...

 

                               **************

 

La question du choix dans un monde absurde.

 

Tout n'est pas dérisoire, oui, tout est peut-être lâche. Nous critiquons avec de fortes raisons la société qui nous entoure. Mais quelle est la raison profonde de notre malaise ? C'est que nous acceptons ce que, en même temps, nous refusons. Essayez donc d'avaler un aliment que vous détestez. Vous allez vomir. C'est ce que nous faisons chaque jour. La plupart des gens passent leur temps à vomir, à avoir envie de vomir...                                                                    

   Les thèses de Camus sur l'absurde sont exactes. Le monde est absurde. mais à l'intérieur de ce monde absurde, et Camus lui-même le découvre dans Le Mythe de Sisyphe, il y a une option obligatoire. Un choix. un bien et un mal. Essayons de vivre dans l'absurde total pendant huit jours. Ce n'est pas possible. On devient fou. Il faut choisir. C'est ce choix qui constitue, qui institue une morale, un ordre..."

 

                                    ********** 

  

 Roman.

 

Je pense, j'ai toujours pensé que le roman n'est pas aussi mort qu'on le croit, mais il a été détourné de sa destination première qui est de parler au grand nombre. Dès qu'il s'adresse au petit nombre, le roman devient conférence. C'est le cas du Nouveau Roman, du roman d'avant garde. Il n'y a ni avant-garde, ni arrière-garde. Il y a des écoles. À bas les écoles ! En réalité, il faut conduire une aventure personnelle. Si on ne se met pas en question, si on ne court pas une vraie aventure, au bout de laquelle on sera vainqueur ou vaincu, avec le risque de se casser la gueule, alors, ça n'a aucun intérêt...

 

                                    **************

Religion.

 

Je ne suis pas du genre anticlérical, je ne l'ai jamais été. Je connais des gens qui sont des rationalistes à tout crin, des gens assez limités. Dieu est un problème, mais il se trouve que je ne pense pas à lui, et que lui ne pense pas à moi... Comme disait Jean Grenier, qui était le maître de Camus et qui est mon ami depuis ma dix-huitième année, c'est à Dieu de faire le premier pas. En ce qui me concerne, il ne l'a pas fait. S'il le fait, on verra, je reste ouvert...

 

                                  ****************

 

Vieillesse.

 

Je crois que la nature vous accompagne à tous les âges  et on finit non pas par accepter comme ça, facilement, mais on s'arrange avec certains ralentissements, certaines difficultés, jusqu'au moment où on sentira que ça va s'arrêter... Pour moi, voyez-vous, le fond du problème, c'est qu'à partir d'un certain âge, non seulement les capacités sont différentes, mais encore la capacité d'entreprendre. On sait d'une façon certaine qu'on n'aura pas le temps de faire ce qu'on a envie de faire, et cela est ennuyeux.

 

Louis Guilloux : extrait d'un entretien avec Gilles Lapouge, Magazine Lire n°11-12, été 1976. recueil "Les grands entretiens de Lire", par Pierre Assouline, Éditions Omnibus, 2000. 

 

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